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Élèves : bien dormir, ça s’apprend !

Jeune enfant en train de dormir paisiblement

Loin de se limiter au seul mécanisme de récupération physique, le sommeil joue un rôle majeur dans les apprentissages. Mais que fait le cerveau quand on dort ? Et comment apprendre à bien dormir ? Éléments de réponse avec Amandine Rey, chercheuse en psychologie cognitive, neuropsychologue et Maître de conférence à l’université Lyon 1, spécialiste des liens entre sommeil et apprentissages, qui nous explique comment les enseignants peuvent aider leurs élèves à retrouver les bras de Morphée pour améliorer leurs performances scolaires.

Les différentes phases du sommeil ont-elles toutes la même importance à l’égard de l’apprentissage ?

Le sommeil est souvent comparé à une succession de trains constitués de 5 wagons : 2 wagons de sommeil lent léger, 2 wagons de sommeil lent profond, 1 wagon de sommeil paradoxal. Chaque nuit comprend le passage de 4 à 6 trains. Durant la phase de sommeil lent, l’activité cérébrale ralentit. Loin d’être inactif, le cerveau participe à la récupération et élimine la fatigue de la journée. Il sécrète les hormones de croissance et élimine les toxines produites par l’activité des neurones. C’est durant le sommeil lent profond qu’il poursuit sa maturation, notamment dans les zones frontales, et ce jusqu’à l’âge de 25 ans. Une fois cette phase achevée, il participe à la plasticité sous-tendant les apprentissages. Le dernier wagon correspond au sommeil paradoxal, celui au cours duquel nous rêvons : le sommeil est profond, on est physiquement incapable de bouger en raison d’une atonie musculaire, mais l’activité cérébrale est très intense et rapide. C’est l’enchaînement de ces deux types de sommeil (lent et paradoxal) qui permet de consolider les apprentissages.

 

Est-il, par conséquent, pertinent d’apprendre juste avant de dormir ?

Si nous n’apprenons pas réellement pendant le sommeil, ce dernier participe activement à la mémorisation, notamment grâce à une réactivation des régions cérébrales impliquées au moment de l’apprentissage et à un processus de tri entre les informations plus ou moins pertinentes. Ce phénomène, connu sous le terme de « réactivation neuronale » ou « replay », active le stockage à long terme des nouvelles informations importantes. Des études ont montré que lorsqu’une période de sommeil était intercalée entre un apprentissage et sa restitution, les élèves étaient plus performants. Il vaut donc mieux apprendre régulièrement, se rafraîchir la mémoire la veille d’un examen et dormir suffisamment la nuit qui le précède, plutôt que se plonger dans une leçon le jour-même !
 

 

apprendre régulièrement, se rafraîchir la mémoire la veille d’un examen et dormir suffisamment la nuit qui le précède
Amandine Rey Chercheuse en psychologie cognitive, neuropsychologue et Maître de conférence à l’université Lyon 1,

Quel est l’impact d’un mauvais sommeil sur les apprentissages ?

Les zones frontales du cerveau qui régissent les fonctions exécutives sont très énergivores et donc très sensibles au manque de sommeil. Si elles ne sont pas suffisamment restaurées, en raison d’une nuit trop courte ou de mauvaise qualité par exemple, leur activité durant la journée sera modifiée. Cela se traduira alors par une moins bonne gestion des émotions et du comportement et, in fine, de moindres capacités d’apprentissage. En classe, les enfants qui ne dorment pas suffisamment au regard de leurs besoins sont ainsi moins attentifs, moins vigilants et moins performants.

 

En France, l’école est-elle adaptée aux besoins de sommeil des adolescents ?

Même s’ils deviennent « couche-tard », les adolescents ont encore besoin de dormir de 8 à 10 heures par nuit, ce qui est difficilement compatible avec l’organisation scolaire. Résultat, ils accumulent une dette de sommeil qu’ils tentent tant bien que mal de récupérer le week-end : une stratégie peu efficace voire contre-productive. Or, des expérimentations en cours tendent à montrer que retarder le début des cours s’accompagnerait d’une amélioration de leurs performances académiques. Cette question mérite donc d’être discutée, mais implique que soient modifiés les horaires de transport et des activités périscolaires.

 

Bien dormir, ça s’apprend ?

Oui, absolument. Pour cela, il faut valoriser les vertus du sommeil, ce qui est malheureusement peu le cas en France. Bien que l’éducation au sommeil figure au programme scolaire, notamment en cycles 2 et 3, les enseignants manquent de ressources sur lesquelles s’appuyer. C’est de ce constat qu’est née l’idée du programme d’éducation « Mémé Tonpyj », destiné aux professeurs de CP, CE1, CE2. Un programme spécialement conçu pour les ados, qui devrait être disponible en 2023.
 

 

Fred, explique moi... Comment le sommeil nous aide à mieux apprendre ?

Youtube conditionne la lecture de ses vidéos au dépôt de traceurs. Pour en savoir plus, vous pouvez cliquer sur « Paramétrer ».

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Pour expliquer l’importance du sommeil dans les apprentissages, l’ancien animateur de « C’est pas sorcier » s’appuie sur le programme « Mémé Tonpyj ». Imaginé par des chercheurs et coconstruit avec des enseignants, des infirmiers et médecins scolaires, des parents et des dessinateurs, ce dernier met à la disposition des professeurs une variété de supports pour aborder la notion du sommeil (capsules vidéo, bandes-dessinées, fiches de présentation...). Testé auprès de 130 élèves de 8-9 ans scolarisés dans 5 écoles différentes, ce programme a permis d’augmenter de 30 minutes en moyenne la durée du sommeil des enfants. Résultats : de meilleures capacités attentionnelles et exécutives, et, in fine, de meilleurs résultats scolaires. Un an après l’expérimentation, les bénéfices perduraient.

Découvrez le programme du CSEN « Fred, explique-moi »

Le Conseil scientifique de l’éducation nationale met à la portée de tous les acteurs éducatifs ses recommandations ainsi que des outils pédagogiques fondés sur la recherche, l’expérimentation et la comparaison internationale.
GMF, partenaire du CSEN depuis sa création, soutient ses travaux et son programme de vidéos pour les enseignants intitulées « Fred, explique-moi ». Ces courtes vidéos proposent des décryptages de la recherche et des conseils illustrés sur les sujets étudiés par les groupes de travail de chercheurs : sommeil, lecture, mathématiques, métacognition, esprit critique…
 

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