« Serious games » : quand les enseignants se prennent au jeu

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Motivation renforcée, engagement accru, créativité développée… les bienfaits du jeu ne sont plus à prouver ! Du primaire au secondaire, les enseignants commencent à s’en emparer : c’est ce qu’on appelle la gamification, ou ludification. Ce concept récent consiste à intégrer des mécanismes de jeu dans les méthodes d'apprentissage. Mais pourquoi y avoir recours ? Comment bien utiliser les jeux pour l’apprentissage scolaire ? Des pionniers nous donnent leurs conseils.

Réduire le sentiment d'effort

Un plateau de jeu, des pions à l’effigie de dragons, des énigmes mathématiques à résoudre, une intelligence artificielle à combattre… tel est le dispositif des « Aventuriers du Dragon ». Un jeu inventé de toutes pièces par Mathieu Malfoy, un professeur de mathématiques et de sciences au lycée professionnel Pierre de Coubertin à Calais, pour ses élèves de première et terminale.
Le but ? Donner à ces lycéens l’envie de résoudre des équations et les faire ainsi progresser, En réduisant leur sentiment d’effort. « Il existe deux types de motivation : la motivation extrinsèque qui vient de l’extérieur, et qui à l’école peut être caractérisée par la volonté d’avoir de bonnes notes, de plaire à son professeur, d’être respecté par les autres élèves, etc. Et la motivation intrinsèque qui vient de l’intérieur, et qui peut être liée à la curiosité, au désir de progresser, ou au plaisir. C’est ce que provoque le jeu. Or cette motivation-là est souvent plus puissante et durable. C’est ce qui fait du jeu un outil tellement formidable dans l’enseignement », explique l’enseignant qui a rédigé son mémoire de fin d’études sur le sujet.
Une idée qu’il décline aussi avec des jeux classiques (Poker, Blackjack…) des jeux proposés dans le commerce (Time’s Up, Dobble, Par Odin…) et des jeux vidéo (Clash Royale, Minecraft et Assassin's Creed, dont des versions éducatives ont été créées) *.
 

Ces jeux doivent s’inscrire dans un dispositif global
Matthieu Malfoy Enseignant

Des jeux pour tous les goûts

Et il n’est pas le seul ! Dans le collège voisin, les professeurs d’histoire-géographie utilisent régulièrement le jeu de rôle pour permettre à leurs élèves de se projeter dans les époques étudiées. Celui que les adolescents préfèrent s’intitule « Les grandes vacances sous l’Occupation », qui permet de se projeter dans la vie quotidienne de deux enfants entre 1935 et 1945 et d’aborder par ce biais les principales thématiques du programme : exode, rationnement, réquisitions, vie en territoire occupé, Résistance, marché noir, troc…
Quant aux professeurs de langues, ils sont de plus en plus nombreux à utiliser les escape games. Le principe de ces jeux d’enfermement ? Obliger les participants à travailler ensemble pour résoudre une énigme, le tout en moins d’une heure et en version originale ! « Alors que certains élèves sont totalement inhibés par le fait de s’exprimer en anglais, ils se mettent à parler avec aisance et le plus souvent sans faire de fautes, sans même s’en rendre compte », témoigne une enseignante parisienne, adepte des jeux proposés par les éditions Nathan.

Jouer « sérieusement » pour mieux apprendre : l’idée n’est pas nouvelle. Les grandes écoles et les instituts de formation continue ont, depuis longtemps, intégré ces « serious games » à leurs modules. Mais depuis quelques années, ces derniers infusent les cours de primaire et du secondaire, souvent sous l’impulsion de professeurs passionnés.
Convaincu des bienfaits de cette pratique, réseau Canopé, spécialisé dans l’accompagnement et le développement professionnel des enseignants, a créé la plateforme « Apprendre par le jeu ». Elle recense tous les jeux utilisables en classe et propose des fiches permettant de les relier aux autres programmes. Un travail important est également effectué par certaines académies, comme celle de Montpellier, qui propose sa propre banque de ressources, intitulée « Jeux Numériques ». De nombreux sites, souvent créés par des pionniers, comme ludikecole.fr ou encore monecole.fr, proposent en outre des outils, conseils et retours d’expérience, pour une mise en œuvre 100 % efficiente. 
 

Un format pédagogique parmi d’autres

Bien sûr, il ne s’agit pas de transformer les classes en cours de récréation. « Ces jeux doivent s’inscrire dans un dispositif global » prévient Mathieu Malfoy, qui se sert souvent de ces moments un peu plus ludiques et légers pour introduire une séquence. « L’intérêt est aussi de varier les formats, afin de capter et conserver l’attention des élèves. Je propose donc également beaucoup de quizz, supports vidéo, des discussions autour de l’actualité, des travaux de groupe... Il reste enfin indispensable de faire des leçons "à l’ancienne", avec tous les élèves tournés vers le tableau. Les élèves ont besoin de ces moments de calme, où l’on fait le point sur les connaissances à acquérir », indique l’enseignant.
Autre écueil : penser que tout son auditoire adhérera de manière unanime. « Les élèves en difficulté sont généralement très clients. Les élèves plus scolaires et performants dans le fonctionnement habituel de la classe peuvent en revanche être déstabilisés par ce format. Certains le rejettent d’office en disant que ça ne sert à rien », témoigne de son côté l’enseignante d’anglais. « C’est pourquoi il est nécessaire de rappeler à tous l’objectif de la séquence : apprendre - certes en s’amusant - mais apprendre avant tout ».
 

Minecraft et Assassin's Creed Discovery Tour

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